Pasquale PAOLI : Correspondances avec Speloncato.

Pasquale PAOLI : Correspondances avec Speloncato.

 

 

Les extraits suivants sont issus du récent ouvrage :

« Pascal PAOLI-CORRESPONDANCE – La construction de l’Etat 1756-1758 » Volume II, édition critique établie par Antoine-Marie GRAZIANI et Carlo BITOSSI aux Editions Alain Piazzola  –  Mai 2005

Merci à François MARIANI pour ses conseils de lecture.

 

C’est à l’époque où Pasquale PAOLI éclaire le siècle des lumières que se rejoignent les histoires de quelques familles du village et celle du père de la patrie.

La correspondance de Pasquale PAOLI nous éclaire sur ce point. Pour remettre ces lettres dans leur contexte, un petit résumé historique tiré du livre :

 

« En Juillet 1755, Pascal Paoli prend le pouvoir. En Novembre de la même année, il présente la constitution de son nouvel Etat. Mais ses débuts ont été douloureux : il lui a fallu combattre un début de guerre civile, contre son rival Matra, soutenu par ses ennemis génois, et la lutte contre la vendetta s’est révélée difficile à mener. Au début de l’année 1756, Pascal Paoli, diminué et amer, est au bord de l’abandon. Paradoxalement, l’arrivée des troupes françaises, parce qu’elles remettent la Corse au centre des préoccupations méditerranéennes des grandes puissances, relance son action.

L’heure est à la construction de l’Etat. Le chef de la nation corse la veut progressive : un à un, il créer des Magistrati régionaux en Balagne, à Corte, dans la Terra del Comune…

Moment capital de l’expérience paoliste que cette période de tâtonnements où il lui faut dégager de nouvelles élites sur lesquelles s’appuyer, s’opposer à l’esprit de parti, tout en conservant le soutien populaire. »

Correspondance avec Ghjuvan’Paulu QUILICI

 

On peut préciser que Ghjuvan Paolo QUILICI de Speloncato, fut comme son père Ambroggiu, un homme d’armes qui s’illustra aux côtés du Père de la Patrie.

Il avait été nommé le 28 décembre 1754, commandant de la troupe chargée de protéger le gouvernement de Balagne. Il fut nommé le 13 Juin 1763 commandant des milices nationales de la région, au grade de colonel.

Il aurait planté le premier le drapeau Corse dans l’île de Capraja, conquise par Pascal PAOLI en Mai 1767. Le chef de la flottille était Achille MURATI. (Source François MARIANI)

Après 1769, et Ponte Novu, alors que Pascal PAOLI était en exil en Angleterre, la résistance se poursuit dans l’intérieur (en 1774, les nationalistes se révolteront, mais se verront réprimés avec rigueur dans le Niolo), et  Ghjuvan Paolo QUILICI fait encore parlé de lui…

Il fit partie d’un groupe de 30 « bandits » arrêtés par les Français en Balagne, le 30 Octobre 1774. Ils ont été enfermés dans la prison de la citadelle de Calvi et déportés à la Grosse-Tour de Toulon.

Entre 1757 et 1758, Pasquale PAOLI dans sa correspondance, cite souvent Ghjuvan’Paulu QUILICI, et lui adresse même des lettres amicales.

 

 

Lettre de Pascal PAOLI à Arrighi et Romani :

 

Casinca, le 28 Janvier 1757.

 

         A notre grand déplaisir, nous apprenons votre désir d’être relevés de vos fonctions, alors que votre conduite était chaudement acclamée par nous comme par votre province. Toutefois, pour accéder à votre désir, nous avons jugé opportun de proposer cet emploi à Messieurs Giovan Paolo Quilici, Ottaviano Orsatelli, et Don Giulio Savelli. Vous accepterez donc, très honorés Messieurs, que, nous aussi, pour ce motif, nous vous envoyions cette lettre particulière afin que, le jour que nous établirons pour la mutation, ils puissent vous succéder au gouvernement.

Lettre de Pascal PAOLI à Quilici, Massiani et Orsatelli, à Speloncato :

 

Corté, le 6 Mars 1757.

 

         Amis,

         Si j’avais parlé d’abord avec Monsieur Passani, j’aurais changé d’idée au sujet de la passation de pouvoirs, et j’aurais avancé d’un mois la constitution du gouvernement. Je ne doute pas que Chiarelli ait semé dans votre province la zizanie ; mais personne ne lèvera la tête, si l’heure n’est pas venue où Dieu veut lui donner le châtiment mérité. Soyez tranquille, ici les affaires vont bien : Matra s’est retiré dans le fort ; la pieve de Castello et le Fiumorbo sont dans d’excellentes dispositions ; les villages d’Antisanti et de Vezzani ne l’ont pas suivi ; ils cherchent à obtenir leur pardon et à Ghisoni on a envoyé monsieur Angelo Mattheo Alberti avec le pouvoir d’y assolder une compagnie et de gouverner toute cette juridiction pendant les présents troubles, et je crois que Matra recevra de son côté de grands dommages. Il sera nécessaire de lui enlever aussi son asile d’Aléria, à partir duquel il organise ses incursions nocturnes et grâce auxquelles il a réussi l’autre nuit à faire prisonnier le pievan de Moita pour lui extorquer par force quelque argent et à qui il a brûler la maison pour masquer ses vols. Tenez moi au courant de tout ce qui se passe chez vous, et croyez moi…

 

Lettre de Pascal PAOLI à  Giovan Paolo QUILICI, à Speloncato

 

         Avril ou Mai 1757

         Ami,

J’ai écrit hier à monsieur PASSANI, à qui j’ai demandé de s’occuper des affaires de la dîme de Giussani. Je suis désolé que vous ne m’ayez pas été recommandé. Faîtes des observations au magistrato pour l’affichage du monitoire, nous lui ferons connaître notre ressentiment. Les affaires de cette région vont bien. Avant-hier la felouque est venue et elle est repartie immédiatement. Des lettres du chanoine Natali (*), écrites de sa propre main nous assurent de son rétablissement. Donnez moi souvent de vos nouvelles. Saluez pour moi Monsieur votre père et Monsieur votre fils, et croyez-moi votre ami très affectionné.

Les gens du Fiumorbo s’améliorent. Aujourd’hui il se tient la Consulta à Lugo di Nazza.

 

(*) la tentative d’assassinat contre Giulio Natali, alors auditeur du Cardinal Feroni, à Rome date de la soirée du 20 Avril 1757. Giulio Natali est le futur évêque de Tivoli.

Lettre de Pascal PAOLI au Magistrato de Balagne :

 

        

         Rostino, le 17 Juin 1758.

 

On nous a fait savoir que quelques sujets de cette province désirent s’employer pour le bien de la commune patrie en occupant la poste de commandement de la troupe, tenu jusqu’à aujourd’hui par Monsieur BARTOLI. Nous savons non moins justes que recommandables de telles requêtes, et pour cela nous écrivons à Monsieur Bartoli pour que, à la fin du mois présent, il transmette le commandement des troupes à Monsieur Giovanni (Paolo) Quilici de Speloncato, qui a été nommé pour le prochain tour. Vous expliquerez aux autres candidats qui se présentent ici qu’ils doivent vous adresser leurs requêtes, et après vous nous enverrez la liste, afin que puisse se faire la nomination de celui qui devra succéder mois par mois.

 

 

 

 

 

Pascal Paoli et le Suprême Conseil d’Etat du Royaume de Corse.

 

 

La  probité et les moeurs de Monsieur Giovanni Quilici de Speloncato de Balagne et sa fidélité, son zèle et sa promptitude dans toutes les occasions qui se sont présentées pour la défense de la patrie nous étant connues, nous l’avons, en vertu de la présente, élu et nommé comme nous l’élisons et le nommons commandant de la troupe qui assiste le gouvernement de cette province avec tous les honneurs, prérogatives et émoluments qui conviennent à un semblable emploi et avec le pouvoir d’inspecter aussi la garnison de l’Ile Rousse. Et comme tel, nous voulons qu’il soit reconnu et par tous respecté et obéi dans cet emploi où il entrera au début du mois de juillet prochain. Et afin que la présente soit signée par notre secrétaire d’Etat et munie du sceau public du royaume.

         Donnée à Rostino ce jour le 17 juin 1758.

         Rocca Secrétaire d’Etat.

Lettre de Pascal PAOLI au Comte Gian Paolo QUILICI, à Speloncato

 

                  Murato, le 7 Juillet 1758

        

Très honoré ami,

La justice dans le Giussani a bien fonctionné et cela sera un bon exemple pour brider les fauteurs de trouble. La prise de possession par le prêtre Vicente Pietri de la Pieve d’Aregno constitue un scandale (*). Il a été nécessaire de publier des ordres un peu sévères. Si l’on n’y obéissait pas, une cloche sonnerait, se qui se révélerait bénéfique, quoique j’aie moi même des parents qui peuvent se sentir concernés. Je dois effectuer le sindicamento  de cette province et on fera de même avec les autres. Capocchia (Agostini) (*1) est bon. Je suis…

 

 

 

(*) Il est donné par le secrétaire d’Etat Rocca par une lettre au magistrato de Balagne du 23 Mai 1758 comme le frère de Chiarelli d’Orezza et aurait reçu ce bénéfice en récompense des ses bons et loyaux services envers la République (de Gênes.)

 

(*1) AGOSTINI Dominique, dit CAPOCCHIA (Tête brûlée) : il est né à Speloncato, et fut lieutenant de Pascal Paoli. Une attaque sur Algajola menée par les nationalistes de Pascal Paoli, commandés par Agostini, échoue le 21 avril 1763. En janvier 1769, feignant une rédition devant Dumouriez qui  tente de prendre l’Île Rousse,  avec l’aide de 150 Corses, non partisans de Pascal Paoli, il parvient à repousser les assaillants.

 

 

 

 

 

 

Lettre de Pascal PAOLI au magistrato de Balagne

 

         Vescovato le 23 Décembre 1758

        

Ce que vous m’apprenez des progrès des Français à Alziprato nous surprend au plus au point. Nous approuvons votre décision d’avoir fait passer un détachement à Montemaggiore, et d’avoir chargé Monsieur l’abbé Salvini de les rencontrer afin de connaître leurs visées et pour leur faire par de la surprise de toute la nation  avant de prendre des mesures les plus rigoureuses pour la défense de notre honneur, de notre liberté. Nous ne pouvons à cet instant vous écrire plus longuement nos sentiments, attendant de vous, Messieurs, des nouvelles supplémentaires sur cette affaire. Nous estimons à propos de vous envoyer Monsieur Giovan Paolo Quilici, avec lequel vous pourrez discuter, celui-ci connaissant nos sentiments. Il sera bon que vous parliez ensemble, afin que vous puissiez nous tenir informés de tout ce qui se passera.

 

 

 

Lettre de Pascal PAOLI au magistro de Balagne

 

Vescovato le 28 Décembre 1758

        

Monsieur Giacomo Leoni de Santa Reparata nous a instamment demandé de prendre le commandement de la troupe de votre garde : nous, ayant connus par expérience son zèle, sa conduite sage et sa valeur et non parce que nous sommes mécontents de Monsieur Giovan Paolo Quilici, mais pour permettre à tous d’espérer et de faire reconnaître son mérite nous avons jugés expédient de lui faire cette grâce pour le prochain mois de Janvier, en lui remettant à cette effet la patente pour permettre la relève de Monsieur Quilici. Vous voudrez bien, Messieurs, le recevoir sous vos ordres.

 

 

 

 

Correspondance avec Domenico ARRIGHI

 

Domenico ARRIGHI de Speloncatu était juriste et législateur. Il fut l’un des rédacteurs des lois constitutionnelles établies sous le généralat de Pasquale Paoli, auprès duquel il occupait d’importantes fonctions politiques. En Août 1753, il fut un des signataires du Manifeste de Belgudè. En 1756, il fut chargé de diverses missions de médiation, notamment à Lumiu. Il fut élu membre du Magistratu di Balagna. Réélu en 1758. En Mai 1761, membre du Guvernu Supreme, il était à Corti avec Pasquale Paoli. En Août, ce dernier le nomma commandant de la force armée dans la province de Balagna. Conseiller d’Etat en 1762, puis 1765. En 1767, il fut élu président de la Consulta Generale. En 1769, après la défaite de Ponte Novu, la chute de Corti et le départ de Pasquale Paoli, il se rallia à la France. Il faisait partie d’une délégation, représentant les familles qui s’étaient retirées sur le Monte Rotondu et ailleurs, qui rencontra le comte de Vaux, à Corti, afin de négocier leur soumission. En 1772, il fut nommé commissaire de la Junte Royale de Caccia. Il décéda en 1789.

http://oursjeancaporossi.club.fr/index.html

 

Jean Pierre Poli écrit dans son texte : « SPELONCATO AU FIL DU TEMPS PASSE » pour l’Accademia Corsa : « Le nom de Domenico Arrighi apparaît souvent dans la correspondance de Paoli dès son retour en Corse en 1755. »

Voici, pour la période que couvre l’ouvrage, une lettre qui soulignerait un lien de parenté entre les deux familles :

 

 

Lettre de Pascal PAOLI à Giovan Domenico ARRIGHI à Speloncato

 

Au très honoré Monsieur Domenico Arrighi, à Speloncato.

 

                  Pietralba, le 15 Décembre 1756.

 

Parent très cher,

Je transmets à mon frère votre lettre et je chercherai dans le même temps à écrire à Paolo Bastiani pour le fusil, bien qu’il se pourrait que celui-ci soit ici pour m’accompagner dans votre province, où je désire me rendre. Votre réflexion sur Lumio, ne me déplait pas ; à partir du procès on aura une meilleure vue des choses.

Présentez, je vous prie mes hommages à Madame Brigida et avec toute l’affection possible, je reste votre très affectionné parent.

 

         Pascal Paoli

 

De plus, d’après ce même ouvrage, (1)  Pascal PAOLI a  souvent séjourné à Speloncato :

 

 

* Le gouvernement de Balagne, tenu au couvent d’Aregno, le 8 Novembre 1756, réunit l’abbé Niccolo POLETTI, Giuseppe FABIANI et Francesco Antonio COLONNA ANFRIANI, au lendemain de la réunion de Pietralba. Le gouvernement décide que Francesco Antonio COLONNA ANFRIANI participera au Magistrato.

Cette décision sera confirmée à la fin du mois de Novembre, lors du passage de PAOLI à Speloncato et Santa Reparata.

 

 

* Pascal PAOLI écrit une lettre de Caccia, le 7 Avril 1758.

Selon Antonio GUIDONI dans une lettre du 11 Avril 1758, PAOLI serait ensuite passé par Belgodère et par Speloncato pour se rendre à Aregno en compagnie d’ANTONIETTI.

 

 

* Le 20 Avril 1758, Pascal PAOLI est à Speloncato; il y écrit une lettre aux Magistrato de la juridiction de Bastia.

 

* Pour compléter, Jean Pierre Poli dans son texte : « SPELONCATO AU FIL DU TEMPS PASSE » pour l’Accademia Corsa, écrit:

 

« En 1763, Pascal PAOLI arrive de Pietralba à Speloncato le 24 août. Il fait une visite de l’Ile Rousse le 25 puis retourne à Speloncato d’où il partira le 9 septembre pour Caccia. ». Il était donc au village le 8 Septembre 1763, et il est probable qu’il ait assisté au passage du soleil à travers la « petra tafunata ».

 

 

(1)   « Pascal PAOLI-CORRESPONDANCE – La construction de l’Etat 1756-1758 » Volume II, édition critique établie par Antoine-Marie GRAZIANI et Carlo BITOSSI aux Editions Alain Piazzola  –  Mai 2005

 

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