LES BANDITS CORSES Banditi Corsi

Source : https://www.corsicamea.fr/bandits/bandits-corses.htm

Un rapport de gendarmerie du XIXème siècle donne du bandit la définition suivante:  » C’est un homme qui répond à une sommation en prenant le maquis ».

 

Il est très rare que les gendarmes arrivent tout seuls à leur fins. Quand on dit qu’un bandit a été pris, c’est généralement parce qu’il a été trahi.

Quand on raconte qu’un bandit a été tué par les gendarmes, les gens haussent les épaules et rigolent en disant:  » il a du être tué après sa mort !  » .

 

Quand un Corse a été insulté, ou pire, quand l’un des siens a été blessé ou tué, il donne à choisir à son ennemi entre « una palla calda ou un ferru freddu » (une balle chaude ou un fer froid).

Jadis, une croix sur une porte était considérée comme le signe d’une menace de mort.

Quand il a un ennemi déclaré le Corse doit choisir entre les trois S, Schioppo, Stileto, Strada (fusil, stilet, fuite). Généralement il prend les trois à la fois!.

Quand il entre en inimitié, le Corse lance à son adversaire: « Guardati, mi guardo ! » (Garde-toi, je me garde). Dès cet instant la promesse de mort est déclarée, non seulement entre les deux hommes, mais aussi entre tous les membres des deux familles. Seuls, les vieillards, les femmes et les enfants ne participent pas à la vendetta, encore qu’on ait vu des femmes prendre les armes dans certaines circonstances. Ainsi, pour une insulte, une histoire de propriété ou de bornage, le secours à un ami, une histoire de femme… autant de raisons qui peuvent paraître comme autant de révoltes contre l’injustice, le Corse se met hors-la-loi et s’en va habiter le palais vert, refuge inextricable de tous les bandits.

Le bandit Corse est tour à tour, l’ami et l’ennemi d’une population qui le craint , l’admire ou le respecte. Alors que le gendarme est « l’étranger », le bandit « appartient »  à la communauté, même quand il est haï. Nourrir, loger, protéger un bandit, c’est s’assurer ses services. Le bandit d’honneur est opposé au bandit percepteur sans qu’il soit réellement possible de les classer respectivement dans telle ou telle catégorie. La littérature romantique s’est emparée du mythe du « bandit d’honneur ». La réalité est beaucoup plus cruelle et parfois plus sordide.

Le nombre de crimes commis en Corse est presque incroyable. On relève sur les registres de la république, en l’espace de trente deux ans (de 1683 à 1715) 28715 meurtres.

En 1588, on avait défendu les armes à feu mais on imagina de vendre des autorisations de port d’armes. Trois ans après cette interdiction, sept mille fusils circulaient en Corse et ceux qui étaient confisqués étaient aussitôt revendus. La même arme pouvait ainsi être revendu huit à dix fois au même individu.

Entre 1818 et 1852, 4646 meurtres sont commis dans l’île, soit une moyenne annuelle de cent trente assassinats. Pour la seule période comprise entre 1821 et 1846, on dénombre 200 homicides en moyenne par an.

Réfugiés dans les montagnes, certains bandits assassinent en quasi toute impunité, terrorisent et rançonnent les populations des villages, parfois même les villes d’Ajaccio et Bastia. Si la vendetta représente à elle seule une partie de la violence en Corse, le statut de bandit permet à travers une violence individuelle de se procurer un argent facile. Les populations locales, en dépit de quelques sympathies, subissent ce tribut criminel et ne se trompent guère sur les ressorts qui animent ces hommes en les nommant : « I Percetori » (les percepteurs). La position de bandit est même une source d’influence dans la société insulaire où la justice a toujours été considérée comme inefficace ou insuffisante.

C’est la raison pour laquelle l’administration décide qu’il convient d’opposer aux bandits non plus une police continentale mais une force indigène. Le gouvernement décide de mettre sur pied un bataillon de voltigeurs corse fort de 400 hommes armés et devant exercer une fonction d’auxiliaires dans le maintien de l’ordre. Ce bataillon sera institué par une ordonnance royale du 23 décembre 1822.

Composé uniquement d’insulaires volontaires dont certains ont choisi de faire partie dans le but inavoué de régler leurs comptes en toute impunité, ce corps de voltigeurs se révèle plus redoutable que les gendarmes mais les excès qui s’ensuivent conduisent à sa dissolution en 1850 et il sera remplacé par la création d’un bataillon de gendarmes mobiles dans lequel choisissent de s’engager de nombreux voltigeurs.

Cependant, la lutte contre le banditisme s’intensifie. Les effectifs de la gendarmerie sont renforcés et réorganisés en 1851. Une loi du 10 juin1853 interdit le port d’armes à feu et d’armes blanches.

On estime que le département est passé de 148 bandits en 1852 à moins d’une dizaine en 1854.

Mais au début des années 1920, le banditisme redevient actif dans l’île et brave les forces de l’ordre impuissantes.

A travers les reportages qui franchissent les frontières, les bandits deviennent même célèbres : Spada, Caviglioli, Bartoli, Romanetti.

Certains d’entre eux se tourneront vers « le gangstérisme » et exerceront leurs activités sur le continent.

Afin d’éradiquer définitivement cette menace, le gouvernement de Pierre Laval organise, largement commentée, amplifiée et déformée par les medias, une véritable expédition militaire.

Le 8 novembre 1931 arrivent à Ajaccio a bord de deux navires mixtes, trois avisos et un avion de chasse, 6 compagnies de 90 gardes mobiles, un impressionnant matériel de guerre composé de deux tanks, dix auto mitrailleuses, vingt camions et des chiens policiers.

Dans de nombreux villages, comme Gagnu, La Punta, Vicu, Palneca, Guitera, Zicavu, les routes sont interdites à la circulation, le téléphone est coupé, le couvre feu est proclamé.

En peu de temps plus de 160 personnes, sont interpellées avec brutalité par les forces de l’ordre et incarcérées à la prison d’Ajaccio ou elles y resteront plus d’un mois sans être cependant interrogées.

En 1935, le dernier des bandits, Spada, sera guillotiné en public, place Saint Nicolas à Bastia.

Le macabre rituel du bourreau Deibler, plus communément appelé « u Boja« , venant spécialement du continent avec ses bois de justice pour exécuter la sinistre besogne, prendra définitivement fin avec cette dernière exécution.

 

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