Le coeur des Saladini

La renommée du nom SALADINI est liée d’abord à l’ébénisterie et au village de Speluncatu.
Anton Giuseppe fut le premier des SALADINI à se faire connaître comme artisan.
Il est né en 1763, comme l’atteste le registre de baptême de la paroisse.

Acte de naissance d’Antoine Joseph SALADINI

Anton Giuseppe fut sans doute un artiste très complet, travaillant toujours en qualité de falegname*. En dehors de ses meilleurs meubles, il a laissé trace de travaux en tous genres. On sait par exemple qu’il construit en 1794 une garde robe pour l’église de Palasca, qu’il répare les marches de l’autel de Speluncatu et qu’il arrange le vitrail près du clocher en 1804, ou encore qu’il fait une croix en 1806.
Son premier contact avec la facture d’orgue semble avoir été la fabrication du buffet de l’orgue de Muro, à l’âge de 35 ans; mais c’est sans doute en 1806 lors de la construction de l’orgue de son village, qu’Anton Giuseppe fut réellement initié à l’art de la facture d’orgue, au contact de Giuseppe et Giovanni CRUDELI…
Dans l’atelier SALADINI, Anton Giuseppe fut secondé par Anton Pietro et sans doute aussi par Anton Domenico, son second fils.
L’atelier SALADINI, va se tourner vers la facture instrumentale. Outre quelques cetere, le premier instrument connu est un petit orgue commode. C’est un chef-d’oeuvre d’ébénisterie et il semble certain qu’Anton Pietro a travaillé en collaboration avec son père. Cette collaboration est confirmée à Zilia; l’orgue est signé du père Antoine Joseph SALADINI à Speluncatu 1831, mais un tuyau de façade porte la marque DPS, (Don Pietro Saladini). A Palasca la tribune de l’orgue a été construite en 1833, par Maestro Anton Giuseppe SALADINI et fils de Speluncatu.
Antoine Joseph s’éteint en 1841 à Speluncatu et son acte de décès à l’état civil le mentionne comme Maestro Falegname.

*Falegname: littéralement « Qui fait le bois », donc ébéniste.

« Les SALADINI signaient la plupart de leurs oeuvres par ce coeur collé en marqueterie. Outre leurs fonctions décoratives, les coeurs servaient aussi à masquer les clous nécessaires à la fixation des bois rapportés.
Anton Pietro SALADINI (1^er fils d’Antoine Joseph) utilisait aussi ce symbole sur les éclisses des soufflets d’orgue en découpant les peaux d’étanchéité en forme de coeur et non pas en forme de losange comme le veut l’usage.
Au cimetière de Speluncatu, quelques plaques funéraires en ardoise adoptent également ce dessin sur des tombes anciennes. »

p.20 Antoine MASSONI « SPELUNCATO »-1992

Cette forme de coeur se retrouve également sur la couverture du parchemin de chèvre, faisant partie des archives paroissiales:
« Libro della congregazione di San Filippo Neri »  16 Luglio 1759
Sur cette couverture, « … au dessus du Saint, un coeur semblable à celui utilisé par les SALADINI. Coeur du Christ, il est l’autel derrière lequel on chante, il est l’esprit, le souffle divin » (indispensable pour faire résonner l’orgue) « mais aussi par le double mouvement de sa pulsation, il est le symbole de la marche du pèlerin à la quête de la révélation divine, l’alternance des pas, l’alternance de la vie et de la mort…, l’alternance du SOL et du LA du modus pellegrinu dans le KYRIE DI I VIVI de Speluncatu. »

1. 234 Antoine MASSONI « Contributions aux recherches sur le chant corse » 1992

Antoine Joseph signe la facture de plusieurs cetere, dont une retrouvée à La Porta, sur laquelle on retrouve, le « cœur » des SALADINI, mais aussi son autoportrait.

Autoportrait d’Anton-Giuseppe SALADINI figurant au dos d’une cetera de sa facture.
« Etat des recherches sur les instruments traditionnels en Corse »
Accademia d’i vagabondi – E voce di u cumune – 1981

Réf. Bibliographiques :
-> « Orgues et artisans à Speluncatu » p.5 à 10  SPELUNCATU 1992
-> « Speluncatu: un artisanat au service de la musique » p.221 à 227 S. RUBELLIN CONTRIBUTION AUX RECHERCHES SUR LE CHANT CORSE
« E Voce di u cumune » 1992

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