Source : https://www.corsicamea.fr/paesi/paesi_intro.htm
Autrefois pleins de vie, petits garçons en culottes courtes et pieds nus, criant et jouant devant l’école, femmes toutes vêtues de noir, la tête recouverte d’un foulard leur mangeant le front, chaussées de gros souliers, le baquet ou la cruche ou le fagot de bois sur la tête, marcheuses infatigables, vieilles aux cheveux blancs, ridées, cassées, que suivaient les troupeaux de moutons, jeunes et vieux travaillant les champs avec une patience infinie, nos villages éparpillés dans la campagne, bâtis sur des éperons rocheux, à flanc de coteaux ou dans des vallons encaissés, reliés entre eux par des chemins à peine praticables à dos de mulet et à pieds le plus souvent, donnaient à la Corse l’aspect d’un immense verger.
Aujourd’hui, la beauté du paysage Corse surprend autant que son poignant délabrement. La désertification des villages de l’intérieur entraîne l’effondrement de demeures souvent magnifiques et les ronces qui parcourent des jardins, hier encore entretenus et cultivés, transforment lentement le paysage en véritable désert saharien. |
Toits et planchers effondrés, sols de terre battue ruisselants de lumière, murs éventrés de ces maisons déchues, jardins envahis par les ronces, sépultures abandonnées, oubliées ou perdues dans l’épaisse végétation, ces ruines austères à l’apparence fantastique, baignant dans l’atmosphère des siècles passés, peuplées de fantômes silencieux, dorment pour l’éternité dans la campagne à l’odorant maquis que parcourent parfois d’intrépides chasseurs de sangliers ou quelques promeneurs égarés.
Bien qu’ils aient été désertés, ces villages et hameaux ne sont pas pour autant abandonnés.
Certains de ces villages fantômes, dont il ne subsiste bien souvent que des ruines enfouies dans un épais maquis, ont été simplement oubliés et leurs noms même, ont été avec le temps, effacés de nos mémoires. Pourtant, ces lieux insolites et mystérieux, sont les vestiges de notre passé, la mémoire séculaire de notre pays et les témoins silencieux des us et des coutumes, des luttes et des souffrances de tout un peuple. Ils sont notre patrimoine et notre héritage le plus précieux.
Parfois, des traces de réhabilitation apparaissent sur les façades de quelques maisons mais le plus souvent, la vieille église, véritable symbole d’un attachement viscéral au pays, a été restaurée par des associations de bénévoles ou grâce à des dons.
Comme beaucoup de mes compatriotes attachés à leurs racines et à leur passé, j’essaie modestement à ma manière de faire en sorte que ces villages perdus dans la montagne, délaissés un jour par le progrès, ne tombent pas complètement dans l’oubli. L’espoir secret qui nous anime tous est qu’un jour peut-être ces villages oubliés puissent retrouver une seconde vie.