COUTUMES ET CROYANCES CORSES Le mariage U Matrimoniu

Source : https://www.corsicamea.fr/coutumes/mariage.htm

Traditionnellement, le mariage était avant tout une affaire de famille. Les parents choisissaient pour leur enfant le promis ou la promise. Ces arrangements se faisaient en fonction de certains critères dictés par des intérêts économiques, idéologiques ou politiques. Dans les villages, deux familles ayant des intérêts communs « arrangeaient » u matrimoniu (le mariage).

Mais, il y avait aussi des jeunes gens qui choisissaient de s’unir malgré l’opposition de leurs parents et qui « forçaient » le mariage. Pour cela, le garçon n’avait pas d’autre solution que de simuler, avec son consentement l’enlèvement de la jeune fille. Quelques jours après cette scapaticcia (fugue), le couple revenait au village obligeant ainsi les familles à considérer leur union comme un fait accompli. Mais, si par malheur, la jeune fille revenait seule au village parce que son union n’avait pas marché, elle devait vivre désormais en recluse portant sur elle la terrible honte de sa faute après avoir subi le plus terrible des outrages :

Entraînée de force sur la place du village, on la plaçait à califourchon et à la renverse sur un âne; et après l’avoir promenée ainsi dans tout le village sous la huée et les sifflets de la foule on l’emmenait hors de la commune et on l’abandonnait ainsi à sa destinée.

Parfois aussi, lorsque les parents s’opposaient au mariage, les jeunes gens, accompagnés de deux témoins, se rendaient à la messe du dimanche et à l’élévation de l’hostie les jeunes gens, chacun à leur tour, devant l’assemblée des fidèles, déclaraient vouloir se prendre mutuellement pour époux puis quittaient précipitamment l’église. C’est ce qu’on appelait u matrimoniu di a volpe (le mariage du renard) ou matrimoniu alla greca (mariage à la Grecque).

Tout le village étant désormais au courant de leur intention, il ne restait plus pour les parents qu’à entreprendre des négociations pour fixer la date du mariage.

Un proverbe Corse dit ceci: « Maries-toi dans ton pays, maries-toi dans ta commune et si tu le peux maries-toi dans ton village« . Il y avait deux sorte de mariages: le mariage « proche » (parfois même consanguin en raison d’une vie paysanne en autarcie) célébré selon le rite du ruban et de la quenouille, et le mariage « lointain ».

Dans le premier cas, les jeunes gens sont accompagnés à la mairie et à l’église.

Avant la bénédiction, le curé faisait placer un seau de bois (secchia) sur la tête de la future mariée. C’est dans cette position de porteuse d’eau qu’elle l’écoutait lui rappeler les devoirs du mariage, après quoi, le curé lui enlevait le seau et faisait son second discours au fiancé.

C’est uniquement le jeune homme qui passe au doigt de la jeune fille l’alliance que vient  de lui remettre le curé et qui est utilisée pour tous les mariages (signe de l’extrême pauvreté qui existait en Corse à cette époque). Elle la gardera  24 heures puis la lui ramènera.

Après la cérémonie, tout le monde -sauf les mariés qui ont droit au carrosse- remonte sur son cheval, sa mule ou son âne et s’arrête à la première fontaine où la mariée se purifie en trempant sa main droite dans l’eau et en faisant le signe de la croix, avant de retourner à la maison en procession. La mère se tient debout sur le seuil et offre à la mariée la quenouille et le fuseau orné de rubans, symboles d’alliance, puis l’embrasse avant de la conduire dans le salottu (salle) où tout le monde la suit.

Dans le mariage lointain, l’un des futurs époux est issu d’un autre village ou d’une autre piève. Un carozzu (carrosse) vient prendre la mariée pour l’emmener au village de son futur époux qui l’attend sur le chemin avec une branche d’olivier. Pendant le trajet, on lance sur le cortège des poignées de riz, de fleurs et de grains de blé. Conduite à sa nouvelle demeure sous le bruit des fusillades, l’épouse est reçue par son beau père qui l’embrasse et lui remet la clé de la maison ainsi que toutes les clés des armoires puis l’invite à entrer.

 

La demande en mariage, dans une société Corse inhibée par la pudeur et la honte, se faisait sous forme de jeu. Pour faire sa déclaration, le jeune homme se débrouillait pour rencontrer l’élue tout à fait par hasard, quand elle allait chercher de l’eau à la fontaine, ou quand elle se rendait à la rivière pour faire le bucatu (lessive). Alors, il s’approchait d’elle et lui parlait sur le ton de la plaisanterie en laissant deviner ses intentions. Si la jeune fille lui répondait de la même manière, cela voulait dire qu’elle acceptait ses avances. Si, elle rejetait sa demande, elle le regardait fièrement, lui montrait son coude puis lui tournait le dos en prononçant des mots blessants. Pour éviter ce genre de déconvenue, c’était souvent le père du jeune homme où de la jeune fille qui se présentait au domicile des parents pour faire une demande dans les règles.

Selon la coutume, on pouvait considérer que deux jeunes gens étaient mariés et pouvaient vivre ensembles quand ils s’étaient donnés l’abracciu (quand ils s’étaient embrassés). Après avoir convenu de la dot, les familles se donnaient l’accolade, tiraient des coups de feu et mangeaient des beignets. Le caractère officiel de cette union (le mariage civil et religieux pouvait n’être célébré que bien plus tard), même s’il n’était pas légal, était sacré par la parole donnée. Rompre l’abracciu, s’était s’exposer à une terrible vendetta.

Si le fiancé meurt avant le mariage, celui ci peut quand même être célébré longtemps après les funérailles et la fiancée doit porter le deuil pendant une année sans jamais sortir de la maison. Si, après le mariage, la femme commet l’adultère, elle peut habiter avec un autre homme. Son époux n’engagera pas de vendetta car il considère que son épouse s’est déshonorée seule et n’est pas digne qu’ un homme d’honneur expose sa vie pour elle.

Mariages au village

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